MERCUTIO,
la mort en riant

[THÉÂTRE] Théâtre Jules Julien | Mercutio | jeu. 9 fév. à 14h30, ven. 10 fév. à 10h et 19h | de 6 à 12€ | 6 av. des écoles Jules Julien | julesjulien.toulouse.fr

Deux comédiens, un pianiste : c’est la recette du premier spectacle musical écrit collectivement par la compagnie toulousaine Jean Balcon. De la mort physique aux divers deuils que nous traversons au cours d’une vie, Mercutio parle de ses sentiments profonds qui sommeillent en nous au cours d’une expérience à la fois vivante et festive. Rencontre avec Julie Duchaussoy, metteuse en scène de la pièce.

| Propos recueillis par Vincent Ducasse
Photo © Jean Balcon

Mercutio est conçu à l’origine pour une représentation extérieure, comment le processus d’adaptation pour une salle se déroule-t-il ?
La difficulté principale est de pousser chaque idée beaucoup plus loin, notamment grâce aux différentes techniques et effets spéciaux présents dans la salle (machine à fumée, système d’accroche, …). C’est le fruit d’un travail collectif avec l’équipe technique de sorte à renforcer la magie et l’expérience immersive du spectateur. Cela permet de créer une véritable émotion même si cette magie ne peut pas se faire sans les acteurs.


Votre pièce parle de deuil, comment mettre en scène un sujet qui peut encore être délicat notamment auprès des plus jeunes ?
Dans nos sociétés occidentales, on ne nous prépare pas suffisamment à la mort. Dès lors qu’un proche meurt, on est souvent envahi d’un sentiment de solitude. L’idée de ce spectacle était de dire que nous ne sommes pas seuls à traverser cette épreuve, et que nous sommes tous égaux face à la mort. Chaque scène de la pièce est entre le sublime et le ridicule et parle de la mort sur un ton léger et humain.


Comment aborder un sujet aussi lourd avec légèreté ?
Pour la légèreté, on trouve des techniques afin que l’ambiance ne retombe pas. En effet, dans la pièce, on a un rythme soutenu, une certaine dextérité, on ne se pose jamais. Ensuite, les lumières et les musiques présentes sont assez joyeuses. Le but étant de faire respirer et sortir le spectateur de ses angoisses.


Justement, comme Mercutio est spectacle musical, qu’est-ce que le piano présent sur scène apporte pour appuyer la thématique du deuil ?
Le piano est à la fois un instrument triste mais qui peut aussi être vivant et renvoyer à la joie. Ce piano apparaît notamment lorsque quelque chose de triste est dit par un des acteurs sur scène, comme pour le contredire. Et la musique au sein de la pièce vient comme un “poil à gratter” pour réveiller l’imaginaire. D’un côté, la musique rassure.

« L’idée est de partager la force que l’on tire de nos échecs, de les raconter avec du recul. »

Vous dites que le biographique côtoie la fiction, est-ce que cela n’est pas trop difficile émotionnellement pour les acteurs de dévoiler auprès du public des éléments difficiles de leurs propres vies ?
L’idée est de partager la force que l’on tire de nos échecs, de les raconter avec du recul. De plus, certains éléments de nos vies peuvent être transfigurés. Par exemple, l’un des deuils des acteurs est de ne pas avoir réussi à réaliser son rêve : celui d’être célèbre, alors que quand on le voit on se dit que c’est un super acteur.


Comment les questionnements existentiels de la prise de conscience de la mort sont-ils mis en scène au sein de la pièce ?
Quand on vient voir le spectacle, on passe une heure à y penser. On pose des questions sur la mort comme si c’étaient les propos d’un enfant : par exemple “Si on brûle, est-ce que je vais sentir ?”. Finalement, rire des choses terribles permet de les transcender. De plus, on s’adresse beaucoup au public et on le prend aussi en compte dans la pièce : le quatrième mur est brisé. Par exemple, on leur distribue des mouchoirs. La pièce est composée d’une dizaine de scènes au total dont chacune a une identité propre et est conçue presque comme un cabaret car certaines sont dansées : l’idée était de se demander qu’est-ce que cela donnerait si on racontait la mort en chanson ?


Pour finir, si vous deviez résumer Mercutio en quelques mots, quels seraient-ils ?
C’est une sorte de cérémonie un peu magique, où l’on donne la parole à des morts. Comme une fête où l’on partage des choses intimes, où l’on se raconte tous des secrets.