GRINDHOUSE PARADISE :
Les frissons & l’angoisse
[FESTIVAL CINÉMA FANTASTIQUE] American Cosmograph | du 4 au 6 sept.
7 € (la séance) | grindhouseparadise.fr
À l’origine, cet entretien aurait du paraître dans notre numéro d’avril 2020, en amont de la première édition du festival Grindhouse Paradise. Le coronavirus en aura décidé autrement. Il faudra finalement patienter jusqu’à début septembre pour découvrir sur grand écran cette promesse de trois jours dans l’Eden du cinéma fantastique. Ou dans l’Enfer, c’est comme vous préférez.
| Propos recueillis par Gilles Rolland
Non, le grindhouse n’est pas né avec Quentin Tarantino et Robert Rodriguez. Le terme désigne, depuis les années 50-60, ces cinémas spécialisés dans les doubles séances et les films d’exploitation, qui aujourd’hui, concerne un tout nouveau festival toulousain !
Porté par l’association Toulouse Fantastic Film Club, le Grindhouse Paradise se donne ainsi pour but d’enfin proposer dans la région un festival entièrement dédié au cinéma de genre, fantastique et autre. Yohann, l’un des créateurs de l’événement, nous en touche deux mots (voire un peu plus)…
De quelle volonté est né le festival ?
Le festival a découlé d’une constatation assez simple : s’il existe sur Toulouse de petites initiatives qui tournent autour du ciné fantastique, il n’y avait pas de grosses manifestations. Les festivals de films fantastiques, il y en a un peu partout en France mais pas dans le sud. Notre but était donc d’instaurer un rendez-vous annuel consacré à ce cinéma, tout en proposant une programmation allant au-delà du fantastique. Tout notre travail vise à mettre en lumière des films qui répondent à certaines catégorisations sans que cela soit restrictif. L’idée était vraiment de diffuser des films qui n’ont pas forcément de la visibilité en salle à Toulouse. Car si la vision qu’a le public et les professionnels de ce cinéma a évolué, on constate que la reconnaissance a entraîné une forme de formatage. Les films fantastiques qui trouvent le chemin des salles obscures commencent ainsi à répondre à un certain standard. Notre but est de montrer des petites pépites aussi originales que barrées. Des œuvres qui font le buzz sur internet mais qui ne sortent pas en salle, malgré leurs grandes qualités.
Pouvez-vous nous parler de la programmation ?
Dans un deuxième temps, nous voulons humblement mettre en avant le travail de ceux qui font le cinéma fantastique mais aussi ceux qui le font rayonner et qui s’en inspirent. Nous voulons sortir du carcan du simple enchaînement de films projetés au cinéma. Cela dit, des films, il y en aura ! 80 % de ceux que nous allons proposer sont inédits en salle (avec une grande majorité de premiers films), avec un drame pop japonais, un film d’épouvante indien, un film d’animation letton, une comédie horrifique irlandaise, une anthologie fantastique américaine… Nous serons également à Vicious Circle pour une expo autour de trois illustrateurs dont le travail est alimenté par le cinéma fantastique, l’horreur, le thriller (100Taur, Moune & Julien l’Apostat).
Le festival a-t-il été compliqué à monter ?
Nous n’avons bénéficié d’aucune subvention. L’organisation était donc étroitement liée à la réussite d’une campagne de financement participatif qui a été un succès. Nous avons senti un vrai engouement et reçu beaucoup d’encouragements.
Photo : Blood Machines © Rumble Fish & Why don’t you just die © Wild Bunch
MONTAGE ALTERNATIF
Dans un autre monde, le maestro du giallo Dario Argento était à Toulouse en avril en tant que parrain de la première édition du Grindhouse Paradise. Dans ce monde-ci, le coronavirus a empêché la présence exceptionnelle du réalisateur de Suspiria & Phenomena (et du dégueulis Dracula 3D, certes…).
Reparti sur les bancs de montage, le festival a tout de même réussi à assembler une programmation alternative alléchante. Notamment via la venue prometteuse de Seth Ickerman. Derrière ce pseudo se cache un duo de réalisateurs aussi prolifiques que discrets, à qui l’on doit un titanesque clip pour Carpenter Brut (« Turbo Killer ») ainsi qu’un fan-film renommé sur Matrix. Un univers Sf et un art consommé de l’image qui tue qu’on retrouve dans leur premier long-métrage, Blood Machines, qu’une des têtes du duo présentera en salle. Une rencontre furieusement indispensable pour quiconque a un jour caressé l’idée de prendre une caméra.
Pas avare en découvertes et autres curiosités, le festival fait par ailleurs honneur à son nom en programmant Why don’t you just Die, comédie noire à huis clos d’un Russe souvent comparé à Tarantino en ouverture. En clôture, rien de tel que l’anthologie horrifique The Mortuary Collection.
Entre les deux, il y aura Tumbadd, thriller fantastique tranchant avec les productions bollywoodiennes traditionnelles ; The Wave sorte de version déjantée et hallucinatoire de Very Bad Trip ; Little Zombies, drame pop expérimental japonais en avant-première (le film ne sortira qu’en novembre) ; I See You, thriller pour amateur de puzzle et de casses-têtes ; Ailleurs, film d’animation fantastique pour « bisseux » précoce (dès 6 ans) ; ou encore le fort intrigant Jesus shows you the way to the highway, hommage total à tout le cinéma bis passant au shaker blacksploitation, kung-fu et science-fiction.
Une première édition complétée par une séance « culte » avec The Wicker Man : une pièce maîtresse d’épouvante païenne et solaire de 1973, complètement dépouillée il y a peu par l’atroce et poseur Midsommar. Et même si on aurait tout de même rêvé d’un double programme avec son remake WTF starring Nicolas Cage, on se contentera de l’original avec le monumental Christopher Lee et Britt Eckland, affolante lors d’une danse érotico-hippie envoûtant le chaste et droit personnage principal. Le jules de l’époque de la belle, Rod Stewart, tentera d’ailleurs de faire retirer la scène scandale. Pas complètement fou, le studio refusera poliment.
| Baptiste Ostré