LA MUSIQUE DANS ZELDA :
harmonies d’un mythe

[POP THEORY] Clutch Collector – Article complémentaire au dossier « Retrogaming & culture pop »

Publié aux éditions Third, le livre La Musique dans Zelda – Les clefs d’une épopée Hylienne, explore les partitions musicales d’une saga culte du jeu vidéo. Un ouvrage dense et passionnant écrit par Fanny Rebillard, une archiviste, musicologue et journaliste-conférencière qui a justement accepté de répondre à nos questions…

| Propos recueillis par Gilles Rolland

Pourquoi Zelda ? En quoi la musique de cette saga vidéo ludique se démarque-t-elle ?

La série Zelda est très importante dans l’histoire de la musique de jeu. Elle fait partie des premières grandes séries sur console de salon (avec Mario, Final Fantasy, ou encore Ys et Dragon Quest) à s’être imposées à travers des mélodies mémorables, qu’on entend encore reprises, 35 ans après, dans les récents opus. Beaucoup de joueurs, dont moi, ont grandi entourés des mélodies de Zelda. Cet amour musical étant renforcé par l’importance particulière portée à la musique et aux instruments dans la série. C’est donc le sujet parfait pour expliquer comment la musique marche dans un jeu, et pourquoi elle est si importante pour l’expérience du joueur.

Rendre la musique interactive, à l’image du jeu, en faire le miroir instantané de l’expérience du joueur. Un défi sans cesse renouvelé avec les nouvelles technologies…

Comment avez-vous entrepris la rédaction de votre livre ? Avez-vous rejoué à tous les jeux depuis le tout premier ?

J’ai évidemment rejoué aux différents épisodes que j’avais sous la main, car c’est toujours important de se remettre les mécaniques en tête ainsi que certains passages. Mais ce n’était pas la partie la plus importante de mon travail, car j’ai déjà eu de nombreuses occasions d’écrire sur la série en tant que chroniqueuse ou au cours de mes études, et qu’il est difficile d’appréhender la musique d’un jeu tout en y jouant. C’est la prise de recul (à travers des enregistrements vidéo par exemple), la prise de notes et l’analyse purement musicale qui ont pris le plus de temps : retracer l’historique des thèmes à travers une vingtaine de jeux étalés sur une trentaine d’années est très fastidieux, car il n’y a pas ou peu de partitions officielles, parfois pas de publication de bandes originales sur CD, ni même d’attribution des morceaux à des compositeurs précis dans les génériques !

Il y a donc eu toute une part de documentation et de recherche pour essayer de retracer et de comprendre le plus précisément possible le contexte de composition et de conception des parties musicales du game play, absolument passionnante mais très chronophage.

De votre point de vue, comment la musique des jeux vidéo a évolué depuis les années 80 et les consoles 8-bits (voire avant) ?

La musique de jeu vidéo a toujours été dépendante des technologies employées pour faire des jeux et des ressources allouées au son. Pendant longtemps, tout reposait sur des puces et des cartes sonores directement intégrées aux consoles ou aux cartouches, qui créaient le son « en direct ». Stocker des enregistrements ou des échantillons de bonne qualité était compliqué par le manque d’espace de stockage. Aujourd’hui, les ressources se sont standardisées et décuplées, les banques de sons sont devenues plus réalistes, on peut stocker de la musique enregistrée par un grand orchestre en excellente qualité sur les supports récents.

Mais une chose n’a pas changé, et c’est ce besoin de rendre la musique interactive, à l’image du jeu, d’en faire le miroir instantané de l’expérience du joueur. Ce point reste un défi sans cesse renouvelé avec les nouvelles technologies : il est parfois plus difficile de rendre un enregistrement interactif que du son purement programmé comme c’était le cas il y a une trentaine d’années.

Photo : Zelda © Third Editions