[ZONE LIBRE]
Le Castelet, sortie de prison !

En attendant de connaître le sort réservé au vaste ensemble constitué par l’ancienne prison Saint-Michel, le Castelet se veut un lieu de mémoire de l’établissement carcéral en lien avec l’histoire de la ville, autant qu’un espace culturel vivant.

| Nicolas Mathé

[MONUMENT HISTORIQUE] Grande rue St-Michel | castelet.toulouse.fr

Avec son allure de château fort médiéval, conçue expressément pour impressionner le passant, l’ancienne prison Saint-Michel a toujours détoné dans le quartier. Et, plus largement, dans le paysage carcéral français. Aujourd’hui, même si les derniers détenus ont définitivement quitté les lieux en 2009, il faut bien dire que l’effet perdure. Devant les imposants murs, à l’endroit où eut lieu la dernière exécution publique de Toulouse, en 1923, la lourde histoire de l’édifice ne laisse pas indifférent. Pour la connaître, il suffit pourtant désormais de pousser les portes. Depuis novembre 2020, le Castelet de la prison, qui correspond historiquement à la cour d’entrée et aux anciens bâtiments administratifs répartis autour, est un lieu de mémoire ouvert au public. Propriété de l’Etat, comme l’ensemble de la prison, le Castelet a fait l’objet d’un transfert de gestion à la Ville de Toulouse qui, depuis 2017, a entrepris des travaux de réhabilitation afin d’en faire un lieu de valorisation de l’histoire de la construction de l’édifice carcéral au XIXe siècle, ainsi que de son rôle durant la Seconde Guerre Mondiale. Au sein des différentes salles qui composent, aujourd’hui, ce lieu d’interprétation, il est donc d’abord question de l’architecture unique de la prison, avec cette étonnant plan en étoile à cinq branches qui, contrairement à ce que laissait penser l’enceinte extérieure, témoignait d’une vision plus humaniste des conditions d’incarcération au XIXe siècle. La visite se poursuit avec d’autres pièces consacrées aux professionnels ayant travaillé à la prison, aux anciens prisonniers, aux événements durant l’occupation, ou encore aux grandes affaires qui ont rythmé la vie des lieux comme l’affaire Allègre ainsi que quelques spectaculaires évasions.

La prison faisait partie de la vie du quartier

PRISON BREAK

Plusieurs destins singuliers sont également évoqués comme ceux de Marcel Langer, célèbre résistant qui aurait été fusillé dans la cour du Castelet, ou d’André Malraux qui aurait, selon la légende, réussi à s’échapper de la prison. « À travers toutes ces histoires et personnages, la mission du Castelet est aussi d’interroger le rôle de la prison, encore aujourd’hui. Ce n’est pas à nous d’y répondre, mais nous mobilisons l’histoire pour réfléchir au rapport qu’entretient une société avec ses prisonniers », explique David Madec, le conservateur en chef du Castelet. Une tâche d’autant plus importante qu’il n’y a, aujourd’hui, plus de prison à Toulouse même. « Certains habitants du quartier ont connu les parloirs sauvages, la queue des familles de détenus devant les murs… La prison faisait partie de la vie du quartier », poursuit-il. Justement, pour faire perdurer ce lien, et en accord avec les associations de riverains, l’autre enjeu de la transformation du Castelet a été d’en faire un espace culturel vivant. Plusieurs expositions y ont déjà été proposées et deux autres sont à venir : une installation de l’artiste Ann Epoudry avec des figurines à base de terre crue (du 22 octobre au 31 décembre), et une expo sur le nageur toulousain au destin extraordinaire Alfred Nakache (du 11 novembre au 31 décembre).