PRINCESS THAÏLAND :
enfant de la bombe

[ALBUM] PRINCESS THAÏLAND | And we Shine (À tant rêver du Roi)

Après un live dévastateur sur la scène du Zénith durant la soirée Clutcho / Oz début mars, le quintet toulousain a sorti ce 24 avril And we Shine. Un second album brûlant, qui rentre avec fracas dans le top de l’année. Chronique bunkerisée.

| Baptiste Ostré

Est-ce l’influence du confinement, durant lequel sort ce deuxième album de Princess Thaïland, formation toulousaine née en 2017 sur les cendres du groupe Sound Sweet Sound ? Toujours est-il que And We Shine sonne parfois à nos oreilles comme si le Nine Inch Nails de la grande époque avait composé la bande sonore de Melancholia. Le réalisateur Lars Von Trier y filmait une fin du monde léchée, au travers du parcours (auto)destructeur de son héroïne dépressive, incarnée par la généreuse Kirsten Dunst. Mais là où le turbulent danois ne laissait aucune issue au monde vivant, Princess Thaïland semble deviner dans la démolition le début d’une reconstruction. Le titre d’ouverture, « First Time », déboule justement dans cette direction, inquiétante mixture de noise-drone, avec groove ténébreux en bonus dès le refrain. Avant de laisser place à la déflagration de « Sonar », et son déluge de batterie débouchant sur une comptine infernale. And We Shine est bien un album qui éclate la tronche, et répète ses coups jusqu’à nous laisser face contre terre. Le genre calibré pour être écouté sur un système de son (très) musclé.

FURIOSA
Mais cette mécanique de rouleau compresseur est contrebalancée dès le troisième morceau, « In This Room », où la flûte ouvre sur une ballade aux réminiscences post-punk. « Now/Where » fusionne ensuite délicatesse et agressivité dans un tour de montagnes russes horrifique et jouissif, parfait pour headbanger furieusement sur des stroboscopes à rendre épileptiques. « We Shine » et « Night After Day » sur lesquels la voix de la chanteuse Aniela fait de véritables merveilles, poursuivent cette confrontation à l’artillerie lourde entre mélancolie et pulsion de vie. Avant qu’ « Into her Skin » n’emboîte tout ce qui a précédé dans un psychédélisme technoïde, survivant d’un imaginaire cyberpunk tentaculaire. Il y a bien une âme dans cette machine. Et c’est de ce supplément de cœur que Princess Thaïland tire justement toute sa puissance.

Photo : Princess Thaïland © DR