THE LIBERTINES AU BIKINI : Thérapie de couple
La 35e édition du célébrissime festival des Inrocks se tenait mardi dernier au Bikini, et même si, à la rédaction, on n’est pas toujours d’accord avec leurs chroniques, on allait pas cracher sur le plateau proposé, avec en tête de gondole le retour des enfants terribles du punk rock UK pour pas dire mondial : The Libertines !
|Mathieu Laforgue – Photo : Ed Cooke
Mardi 26 février, toujours pas de neige sur la Ville rose, mais pas mal d’embouteillage pour se rendre au « Biko » comme disent les jeunes. Seuls mots utilisés dans ce report de concert pour la nouvelle génération, car mardi soir, nous avions affaire à un évènement réservé aux quadragénaires et plus. Deux preuves incontestables : le parking est plein au moment où la première partie démarre (très bonne ouverture des hostilités au passage par les locaux de CROY), et l’espace de circulation dans la fosse est réduit, l’IMC (Indice de Masse Corporelle pour les non médicamenteux) grandissant avec l’âge, ce n’est pas Peter Doherty qui dira le contraire.
À l’affiche du troublant documentaire « Stranger in my own skin » réalisé par son épouse Katia De Vidas et visible depuis une semaine sur la chaîne cryptée numéro 4, ce bon vieux Pete est de retour sur la scène du Bikini, mais cette fois avec The Libertines, monument du rock du début du siècle, parti trop vite en fumée après deux albums cultes, très mauvais jeu de maux.
Mais au final, c’est quoi le plus dur, se rabibocher avec ton ex compagnon de scène – faut dire que dans leur union ils ont connu le pire sans forcément se souvenir du meilleur – ou passer après The Lambrini Girls qui ont littéralement démonté le spot ? Absent pour refus d’autorisation de sortie de son EPHAD, mon compagnon à moi, Jesse m’avait averti sur le phénomène, mais en effet, on n’oubliera pas de sitôt ce trio féminin pas vraiment au goût de sa Majesté le Roi Charles. Pas d’inquiétude, nous reprendrons du service en duo dans une dizaine de jours pour SLIFT, autre tornade sonore en bonne et due forme.
Quarante minutes de balance plus tard, les premières notes d’« Up the Bracket » résonnent, la magie opère, cet hymne n’ayant pas pris une ride. Après avoir laissé l’ouverture à Doherty, Carl Barât entre en jeu sur un « Vertigo » toujours aussi aérien. Riffs chirurgicaux, veste en cuir sur mesure, c’est bien lui le chef d’orchestre du quatuor. Les morceaux s’enchainent comme à la grande époque, le tout dans une « cool attitude » déconcertante. On ne va pas se mentir, on a vieilli nous aussi mais les deux larrons semblent bien plus abordables qu’il y a vingt piges. Campé derrière sa batterie, Gary Powel qui avait d’ailleurs suivi Barât sur Dirty Pretty Things, assure la section rythmique, alors que je suis dans l’interrogation de la saison de Peaky Blinders dans laquelle j’ai vu John Hassall, bassiste du quatuor. « Can’t stand me now », « What Katie did », « Time for heroes », tous les classiques y passent pour notre plus grand plaisir et celui de nos deux acolytes qui ne cessent de s’encanailler sur scène, jouant guitare contre guitare ou chantant dans le même micro.
L’ambiance est à la fois joviale et électrique, le set balancé sans fioriture s’avère excellent, t’as la tracklist juste en dessous, et avant la traditionnelle piqure de rappel finale « Don’t look back into the sun », « Good ole days » rappellera au bon souvenir des Clash le travail de Mick Jones avec ses quatre garçons dans le vent de Helm. Tombée du rideau, une dernière pinte pour la route, et après les réactions à chaud et autres échos partagés des buvettes de Montpellier et Nîmes les jours précédents, le divorce parait enfin consommé, The Libertines ne restera définitivement pas une étoile filante de l’histoire du rock n’roll, et l’on attend désormais avec impatience avril et la sortie d’All Quiet on the Eastern Esplanade.
Epilogue. Pour en finir là où nous avions commencé, une histoire d’IMC, et en grand fan du bonhomme, même si fortement déçu lors de son passage « solo » dans le même lieu en 2011, ce Peter Doherty là, accro au clacos plutôt qu’à l’héro, les produits laitiers des sensations pures, fait vraiment plaisir à voir, ses multiples cures ne l’ayant pas amputé d’un talent jubilatoire notoire, celui de nous embarquer bien loin avec des arpèges dont lui seul à le secret, bien accompagné faut dire par un Carl Barât en forme olympique, de très bonne augure à quelques mois des Jeux de Paris.
God save The Libertines !