[ZONE LIBRE]
A69, l’autoroute
de l’impasse !

Une des luttes écologiques les plus emblématiques se joue actuellement aux portes de Toulouse, sur le tracé de la future autoroute A69, en direction de Castres. Zoom sur ce projet d’un autre temps.

| Nicolas Mathé

Il fallait voir la déception qui régnait sur les plateaux des chaînes d’info en continu au soir du grand week-end de rassemblement contre l’A69 les 22 et 23 avril derniers. Pas de Sainte-Soline bis, aucune violence à commenter malgré la crainte, exprimée récemment par le ministre de l’intérieur Gérald Darmanin, que des « écoterroristes » installent une ZAD sur le tracé de cette future autoroute. Les organisateurs ont réussi leur coup : braquer les projecteurs nationaux sur leur lutte sans que rien ne vienne la ternir. Le collectif La Voie est libre, la Confédération Paysanne, Extinction Rebellion, les Soulèvements de la Terre et les nombreuses associations à l’origine de cette mobilisation avaient prévenu : « ce week-end sera une façon de montrer la pertinence, l’humour et la force composite du mouvement ». Les plus de 8000 personnes réunies à Saix, dans le Tarn, ont ainsi pu assister à une course de caisses à savon, à des concerts ainsi qu’à la construction symbolique d’un mur en parpaings sur la RN 126 qui relie actuellement les deux villes. Grandes marches, festivals, enfouissages de reliques le long du parcours… Depuis plusieurs années, les opposants rivalisent d’imagination pour démontrer leur détermination et faire primer le vivant face à un projet destructeur jugé aussi dépassé qu’aberrant.

UNE HISTOIRE DE TEMPS
Mis sur la table par les dirigeants des laboratoires Pierre Fabre implantés à Castres, cela fait en effet plus de trente ans que le projet d’autoroute pour relier Toulouse est dans les cartons. Avec le soutien de l’État, du Conseil régional d’Occitanie ou encore du Département du Tarn, les choses se sont accélérées ces derniers mois. Le contrat de concession a été signé avec le groupe Atosca NGE en avril 2022, entre les deux tours des présidentielles. Et les premiers travaux ont démarré en mars dernier. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : 60 kilomètres de goudron bordant une route nationale déjà existante pour un montant estimé à 530 millions d’euros, près de 400 hectares de terres artificialisées… Sans compter le futur prix, environ 17 euros l’aller-retour, ce qui en ferait l’autoroute
la plus chère de France, et le fait que plusieurs tronçons déjà en 2X2 voies seront intégrés au tracé de l’autoroute, « privatisant ainsi des infrastructures publiques au profit des concessionnaires », avancent les collectifs. Le tout pour un gain de temps de trajet estimé à 15 minutes par ces derniers. En face, toujours le même argument : le désenclavement. Castres étant la seule agglomération de plus de 100 000 habitants à ne pas être reliée à sa capitale régionale par une voie rapide. Un discours de plus en plus difficile à tenir pour des collectivités dans le climat actuel. Alors que Clément Beaune, ministre des Transports, a évoqué la nécessité de réduire les impacts environnementaux du projet, les opposants, eux, réclament « l’arrêt immédiat du chantier ».