[ÉTAT DES LIEUX]
LOISIRS INDOOR
À TOULOUSE,
ENTRE LES MURS !

Alors que le temps ne se prête pas encore à toutes les activités de plein air, Clutch profite de l’occasion pour pousser les portes de ces centres de loisirs indoor qui ont vu le jour ces 10 dernières années à Toulouse. Un petit tour d’horizon pour constater la course à l’originalité qui agite ce secteur en pleine ébullition.

| Nicolas Mathé

Pendant longtemps, il n’y avait guère que les bons vieux bowlings comme genres de lieux ou se distraire au chaud. Voire les salles d’arcade qui avaient fini par disparaître. Apparurent ensuite les centres de foot indoor qui ont commencé à s’installer dans les grands hangars des zones commerciales pour proposer des conditions de jeu indépendantes des aléas météorologiques. Et puis en une décennie à peine, c’est tout un paysage dédié aux divertissements en tous genres, certains même spécifiquement créés, qui a poussé dans les villes : « kids parcs », trampoline, escalade, laser game, jeux de simulation… Comme tout phénomène, le succès des loisirs indoor traduit autant qu’il épouse une évolution de la société. De par leurs amplitudes horaires ou leurs emplacements, ces salles d’un nouveau genre ont su s’insérer dans des quotidiens de plus en plus rythmés par le travail. On y vient pour décompresser en famille ou entre amis autant qu’entre collègues, afin de créer des liens dans un esprit très « team building ». S’ils ont eu chaud pendant la période Covid, ces lieux sociaux jouent aussi sur le besoin de sortir du « chacun derrière son écran » et sont repartis de plus belle depuis la fin des restrictions. Entre le fameux métro, boulot, dodo, une dose de loisir facilement accessible est en effet la bienvenue pour éviter la déprime. Et pour utiliser le langage business, les promoteurs de ces activités en intérieur ont parfaitement compris qu’ils devaient offrir aux clients un « élément transformationnel ». Autrement dit, que ceux-ci se sentent transformés de manière positive grâce une expérience différente de ce qu’ils auraient pu vivre en restant à la maison.


Entre le fameux métro, boulot, dodo, une dose de loisir facilement accessible est la bienvenue pour éviter la déprime

FRISSONS ET TECHNOLOGIE

Pas étonnant donc qu’on assiste ces dernières années à une véritable course à la nouveauté ou à l’activité la plus insolite. Qui aurait pu prédire par exemple qu’un jour on s’amuserait à lancer des haches sur une cible ? Ou à littéralement tout casser dans une salle prévue à cet effet ? Deux activités permises à Toulouse par le Karnage Club (voir 3 question à… en fin d’article). Mais l’essor des activités indoor doit aussi beaucoup à l’apparition des escape game et à la folle inventivité qui règne encore aujourd’hui dans ce secteur. Les amateurs de frissons et de remue-méninges collectif ont largement de quoi satisfaire leurs envies dans les parages. À l’image de Projet Dédale, enseigne située en centre-ville dont le concept « Dark Tattoo » a raflé en septembre 2023 le prix de la meilleure salle d’Occitanie à l’occasion des Escape game awards. Une récompense saluant l’originalité des moyens mis en œuvre pour plonger les participants dans cette histoire de réseau clandestin responsable de disparitions à Toulouse et sur laquelle ils doivent mettre la main en tant qu’agents. Fort de ce succès, Projet Dédale s’apprête à ouvrir une nouvelle salle à Esquirol. Autre acteur majeur dans la Ville rose, la société Enigma Escape vient, elle, d’inaugurer un troisième site avec un concept unique d’enquêtes dans un monde ouvert, en immersion dans des ruelles asiatiques. Tandis que d’autres encore poussent le concept plus loin, comme Onlive, premier « deepgame » – mélange d’escape game et de théâtre immersif avec la présence de comédiens pour animer le jeu – à débarquer en ville. Alors que les casques VR à usage domestique commencent à se démocratiser, les salles de réalité virtuelle rivalisent, elles aussi, d’imagination pour proposer des expériences « transformationnelles » (différentes de ce qu’on peut faire à la maison, pour rappel). Parmi les nombreuses qui ont vu le jour ces dernières années, District 707, installée depuis un an dans le centre commercial Compans Caffarelli, se distingue notamment avec son jeu de tir en équipe dans lequel les joueurs se déplacent en totale liberté dans un espace de 200 m² avec des murs et des obstacles. Nécessitant de porter sur soi un équipement de 8 kg, l’activité a l’avantage de mêler technologie innovante et dépense physique.

INTÉRIEUR SPORT

Deux cases à l’importance prépondérante dans le boom des loisirs indoor, dont l’art consiste aussi à recycler et adapter les pratiques sportives. Qu’il s’agisse de disciplines classiques comme le basket avec la Hoops Factory, ou d’autres plus récentes. Présentant son concept comme unique au monde, Urban Corp abrite en effet sur son site de la Zone Thibaud un mélange d’activités étonnant autour du franchissement d’obstacles et de la remise en forme : cross training, fitness, escalade mais aussi parkour, trampoline, course d’obstacles, parcours inspiré de l’émission Ninja Warrior, ou encore chase tag, sorte de jeu du chat et de la souris modernisé qui donne lieu à des compétitions… Un projet fou porté par l’acrobate Loic Giorgi, ancien membre du Cirque du Soleil et finaliste de Ninja Warrior. La télévision est d’ailleurs une source bien profitable d’inspiration pour les centres de loisirs comme le prouve cette autre salle toulousaine qui, elle, revendique un concept à mi chemin entre Fort Boyard et Prison Break. Intitulée Prison Island, elle met au défi les aventuriers de venir à bout des épreuves de chacune des cellules en usant d’adresse, d’équilibre et de réflexion. Dans la même veine, on peut également citer Quiz Room qui permet de se mettre dans la peau d’un candidat façon jeu télévisé. Autant dire que des cerveaux sont encore actuellement en ébullition pour trouver le nouveau concept à mettre en salle. Ou l’activité que l’on pensait devenue ringarde à remettre au goût du jour, à l’image du karaoké. Comme l’impression que plus la société se durcit, plus on cherche de nouveaux moyens de se divertir.

3 QUESTIONS À… GUILLAUME FAURÉ
Gérant du Karnage Club

Comment avez-vous eu l’idée de créer une salle de démolition ?
J’ai connu le concept de fury room, ou rage room, lors d’un voyage à Montréal en 2016. J’avais trouvé ça complètement débile tout en me disant que ça pouvait marcher. L’idée a fait son chemin, il y a eu entre temps la grosse vague des escape game et des loisirs indoors en général, et quand une première fury room a ouvert à Paris, j’ai décidé de me lancer. C’était en 2018 et aujourd’hui nous avons un site à Toulouse avec fury room, lancer de hache et karaoké, ainsi qu’un autre à Cornebarrieu qui propose uniquement le lancer de hache.

Que viennent chercher les clients dans une fury room ?
Je crois qu’il ne faut pas aller trop loin dans le côté psychologique. Les gens viennent principalement pour s’amuser plus que pour se défouler ou se libérer. Il y a l’excitation de faire quelque chose d’interdit. Qui n’a pas rêvé de défoncer une imprimante qui marche une fois sur deux ? En tout cas nous sommes complets plusieurs semaines à l’avance.

Pensez-vous que le concept puisse se développer encore plus ?
Je crois que pour l’instant, nous sommes les seuls dans le sud-ouest. Il faut dire que trouver du matériel à casser représente une grosse contrainte. On passe un temps énorme à chercher des partenaires pour proposer un service à la hauteur avec des choses un peu compliquées à démolir. Tout ce qu’on récupère n’aurait pas été recyclé, c’est une deuxième vie éphémère.